La meilleure apprentie de France est Torcéenne

Publié le par Ludovic Francisco

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Après avoir été distinguée à l’échelon départemental et régional, Pauline Genty, 19 ans, a été nommée meilleure apprentie de France, la semaine dernière, au Sénat. Un bel exemple de réussite féminine dans le travail manuel.

 

Elle voulait « arrêter l'école ». Elle veut aujourd'hui porter ses études « le plus loin possible ». Pour Pauline Genty, le goût de l'école est revenu du jour au lendemain. Le déclic est survenu un jour, alors qu'elle s'ennuie en classe de seconde au lycée Nerval de Noisiel. Un voisin de son âge, en visite à la maison, lui vante les mérites d'une formation de céramique proposée par le lycée du Gué-à-Tresmes, à Congis-sur-Thérouanne, près de Meaux. « Dans l'esprit de Pauline, ça a fait tilt », raconte sa mère. Il faut dire que la jeune fille voue alors à l'école un désamour complet. Durant quatre ans, elle s’est rendue au collège « à reculons ». Au lycée, elle a redoublé la seconde. La faute à une désaffection notoire pour le savoir tel qu'il est prodigué dans les filières générales. Car ce qui fait vibrer Pauline, c'est le travail manuel. Malgré la perplexité de ses parents, Pauline décide donc de s'inscrire en CAP « Modèles et moules ». Elle qui rechignait à parcourir les cinq cents mètres qui la séparaient de son lycée emprunte désormais dans la bonne humeur le train de banlieue qui la mène à l'établissement congissois, à trente kilomètres de là. La motivation qui l'anime dans la réalisation de vases en grès, en faïence ou en porcelaine ne tarde pas à la faire remarquer de ses professeurs. Pauline achève sa formation en une année, au lieu de deux. Elle décide d'enchaîner avec un brevet de métiers d'art (BMA), l'équivalent d'un bac pro, spécialité « staffeur ornemaniste ». Un métier à la jonction de l’art et du bâtiment, qui consiste à réaliser des éléments de décoration en plâtre. Là encore, la Torcéenne surclasse ses camarades. Plus tard, elle effectue un stage à la manufacture de Sèvres, une des plus célèbres manufactures de porcelaine d'Europe. A la sortie, on lui propose un poste. Refus. « Je n'avais pas envie de faire des assiettes pour l'Elysée... », avoue-t-elle. Mais en cours de formation, son destin change : la possibilité de se concourir au challenge du meilleur apprenti de France se présente à elle.

 

Elle reçoit son diplôme des mains de Gérard Larcher

 

Tout comme sept de ses camarades, Pauline décide de tenter sa chance. « C'était un défi lancé à moi-même. Mais je me suis donnée les moyens de le relever. Chaque jour, je m'attelais à ma pièce. A midi, je déjeunais en quinze minutes pour y revenir. Lorsque j'avais une heure de trou entre deux cours, pareil. Et quand je rejoignais la classe, j'étais couverte de plâtre ! » La pièce qu'elle prépare, c'est ce qu'on appelle dans le jargon un « regroupement d'éléments architecturaux ». Une récitation de gamme, en quelque sorte. Toutes les techniques appliquées au staff y sont convoquées : le polochon, la cannelure, le traînage, la plaque... La pièce est présentée une première fois à Melun, pour l’épreuve départementale du concours. D'où Pauline ressort vainqueur. Elle l'est de nouveau quelques semaines plus tard à La Villette, pour la phase régionale. Puis, enfin, au niveau national. C'est ce prix que la jeune femme est venue retirer, en compagnie de 280 autres lauréats venus de toute la France, au Palais du Luxembourg, la semaine dernière. Gérard Larcher, président du Sénat et Gérard Rapp, président des Meilleurs ouvriers de France, lui ont remis la prestigieuse distinction. Après avoir longtemps douté des choix de sa fille, Mme Genty, ergothérapeute à la retraite, est aujourd'hui ravie : « Toutes mes filles ont fait de longues études générales. La plus âgée a un bac+6 et doit se contenter de CDD. Alors, forcément, quand je vois que Pauline, qui a choisi une route un peu particulière, est proche de trouver sa voie, je me dis : belle ironie ! » Après les honneurs, Pauline ne compte pas s'arrêter là. Actuellement, elle envisage de poursuivre avec un BTS à Olivier-de-Serres, l'Ecole nationale supérieure des arts appliqués. A moins que cela ne soit à l'Institut national du patrimoine. Sans parler d'un éventuel stage aux ateliers de moulage du Louvre... « Mais pour tout ça, il me faudra faire une remise à niveau en français et en sciences. Ils ne prendront que les meilleurs... » Une catégorie à laquelle Pauline semble désormais appartenir.

Publié dans culture

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