Les Asiatiques veulent être mieux représentés

Trois élus seine-et-marnais s’élèvent aujourd’hui contre le manque de représentativité politique des Asiatiques dans l'ensemble des instances territoriales. 

« Nous ne voulons plus être les oubliés de la République ! ». Cet appel, c'est celui de l'Union des Vietnamiens républicains (UVR). Ce mouvement, qui soutient officiellement l’UMP, milite depuis une trentaine d’années pour la défense des intérêts des Asiatiques de France, Chinois, Vietnamiens, Cambodgiens et Laotiens notamment. En Seine-et-Marne, l'UVR est représentée par plusieurs personnalités. Trois d'entre eux occupent d'ailleurs des fonctions dans des municipalités du nord du département. Alain Buis, leur leader, est conseiller municipal à la mairie de Saint-Thibault-des-Vignes. Un mois après les élections régionales, l'agent marketing de 49 ans crie son exaspération : « Il y a un an et demi, le président de la République a invité le monde politique à s'ouvrir à la diversité et à accueillir davantage de candidats issus des minorités. Ce discours a suscité un immense espoir dans notre communauté. Mais les dernières élections régionales ont douché notre enthousiasme. Certes, la diversité est plus présente, mais pas toutes ! Les communautés asiatiques ont été complètement écartées des débats et des listes de candidatures, en particulier en Seine-et-Marne. » Lorsque nous lui opposons la présence de Jean-Vincent Placé, Coréen d'origine, au sommet de l'exécutif régional (il est 2e vice-président), le conseiller communautaire de Marne-et-Gondoire s'insurge : « Mais Jean-Vincent Placé méconnaît complètement la culture asiatique ! Il n'y est d'ailleurs pour rien : il est arrivé en France tout jeune et a été élevé par une famille française. »

Abstention record dans les villes asiatiques

Nang Cagnat, adjointe au maire à Esbly, livre un constat similaire, avec un franc-parler qui n'appartient qu'à elle : « Quand les élections arrivent, les grands leaders politiques savent nous trouver. Ils ne se privent pas de nous dire qu’ils ont besoin de nous. L’UMP a toujours considéré notre communauté comme acquise. Et ils ont raison : les Asiatiques soutiennent historiquement la droite. En novembre dernier, nous avons rencontré Yves Jégo et Valérie Pécresse. Nous leur avons envoyé nos trois candidatures. Durant la campagne, nous avons également donné un coup de main à Chantal Brunel (4e sur la liste UMP de Seine-et-Marne, en mars dernier, ndlr). Mais au final, qu'avons-nous récolté ? Rien. Pourtant, nous ne sommes pas des débutants », tempête cette hôtesse de l'air retraitée qui fut, en 1989, la première femme asiatique élue en France. Selon Céline Nettavongs, conseillère municipale à Chelles, ce manque de considération envers les élus asiatiques du département s'est traduit dans les urnes localement : « Les Asiatiques, et en particulier les jeunes, ont de plus en plus de mal à s'identifier aux candidats aux élections. Ils auraient pourtant bien besoin d'un symbole pour s'intéresser à la politique... » Les scores enregistrés lors des dernières élections régionales tendraient à lui donner raison. Lors du premier tour, le taux d'abstention a atteint des sommets dans plusieurs villes de Seine-et-Marne à forte population asiatique : Bussy-Saint-Georges a ainsi enregistré 64% d'abstention, Noisiel 65%, Torcy 67% et Lognes, première ville asiatique de France, 70%... Alain Buis conclut : « Les Asiatiques sont souvent accaparés par leurs activités professionnelles. C'est la façon qu'ils ont trouvé pour s'intégrer à la société française, même si cela s'est parfois fait au détriment de la maîtrise de la langue. Mais il est temps qu'ils s'intéressent à la politique. Pour cela, les responsables politiques doivent prendre leurs responsabilités. Et cette fois, nous les attendons au tournant ! »

Chantal Brunel réagit
Nous avons invité la députée UMP de la 8e circonscription de Seine-et-Marne à réagir aux propos des membres de l'UVR : « Je tiens dans un premier temps à préciser que ces trois personnes n'appartiennent pas à ma circonscription. Si elles ressentent une injustice, qu'elles n'hésitent pas à se rapprocher de leurs députés respectifs (Yves Albarello et Franck Riester, ndlr). Pour ce qui concerne mes relations avec la communauté asiatique, je crois pouvoir dire que je suis extraordinairement présente auprès d'elle. J'ai pris part, pas plus tard que ce week-end, à un repas de femmes laotiennes à Bussy-Saint-Georges. Grâce à moi, un lieu de culte asiatique va être prochainement ouvert dans cette commune. Je préside par ailleurs un groupe d'amitié France-Cambodge et suis en liaison constante avec les associations vietnamiennes. C'est un faux procès qui m’est fait. Ceci étant dit, je partage l'analyse faite par ces trois personnes : les Asiatiques méritent d'être mieux représentés, eu égard au rôle joué par eux dans le département. »